Sommes-nous déjà en vérité sous l’emprise de l’intelligence artificiel ?
Avant de se poser la question, j’aimerais en définir les termes. Pour ce qui concerne l’intelligence : faculté de connaître et de comprendre. Pour ce qui concerne artificiel : c’est le produit par le travail de l’homme.
La méprise apparaît véritablement sur le terme de l’intelligence : faculté de connaître. Ce que l’IA met à notre disposition, grâce au travail des informaticiens et des chercheurs, c’est l’accès à un domaine d’informations phénoménal. Cette production est vraiment artificielle, elle est une capacité de compilation, un univers quantitatif mis à disposition de l’intelligence de l’homme pour l’aider, à travers le savoir, à approcher la connaissance et à la comprendre. A cet endroit, son utilisation est un véritable progrès.
Mais alors, vient la question fondamentale, ne serait-on pas en train de confondre le savoir et la connaissance ?Savoir : avoir présent à l’esprit, pouvoir affirmer l’existence de, avec, pour synonyme connaître ! La confusion est là ! Aristote montre bien qu’un savoir, pour devenir connaissance et nourrir l’intelligence de l’homme, doit être compris.
Est-ce que l’IA est un outil de compréhension ? Non, c’est un outil de savoir, un facilitateur, un compilateur mais non une intelligence au sens originelle du terme. L’IA et ses créateurs prétendent substituer le savoir à la connaissance. Cette confusion arrange bien tout le monde en évitant le travail de la conscience. L’artificiel de l’intelligence nous rend plus fainéants puisqu’il évite le travail de l’esprit dans la recherche du sens.
En étiothérapie, nous travaillons l’émergence de l’information et son identification. On ne se substitue pas au travail du patient qui est celui d’accepter ce que nous lui avons permis de comprendre, car cette acceptation lui est propre et propre à sa conscience. En tant qu’étiothérapeutes, nous identifions une grande quantité d’informations sans prétendre à nous substituer à l’intelligence de nos patients.
L’éditorial du mois de mai 2024 énonçait une évidence : la conscience doit précéder l’acte afin que celui-ci soit cohérent. C’est ce que nous faisons de l’information qui est important. C’est l’utilisation de ce que nous découvrons qui témoigne de l’intelligence humaine. Mais si cette information émerge, c’est qu’elle est déjà présente. Le propre de l’opérativité de l’étiothérapie est de mettre en évidence ce qui n’a pas été compris ou accepté dans la dynamique du patient, et qui cause sa pathologie.
Ce que nous associons, en date et en situation, permet de faire émerger à la conscience l’existence du lieu occulté, (information/énergie perturbante). Ce n’est pas le fait d’associer divers éléments entre eux, de gérer une quantité phénoménale d’informations qui procède de l’intelligence, c’est ce pour quel intérêt cet acte thérapeutique est posé. La recherche des mémoires passées, immobilisées n’a d’intérêt que par les effets délétères qu’elles révèlent. L’évènement en tant que tel n’est pas essentiel, c’est ce que nous en faisons et ce qu’il en révèle.
Nous avons trouvé le moyen d’assembler, de faire émerger de façon artificielle, (le passé n’existant plus), une somme de mémoires qui perturbent la cohérence, car celles-ci sont non conscientisées. Ce moyen thérapeutique est une dynamique de recoupement, d’assemblage de l’inscription de ce qui a existé afin d’en faire émerger et d’en appréhender le sens.
Il y a une intelligence du procédé pour obtenir le résultat qui est le soin. Pour autant, c’est essentiellement l’intelligence consciente du thérapeute qui fait émerger la compréhension partagée avec le patient. Nous voyons bien qu’il ne sert à rien d’identifier, de compiler l’information (ce que fait très bien l’IA), mais, c’est d’en comprendre le sens. Et ce sens appartient à l’intelligence humaine.
Ce n’est pas le soin qui transforme la personne, il en est le moyen. C’est de permettre au patient, par les données émergentes, de comprendre. Là est la responsabilité de celui-ci, car personne, même le thérapeute, ne peut faire ce travail d’intelligence à sa place.
A bientôt pour notre rencontre du postgraduate du 20 juin afin de lier notre compréhension de l’étiothérapie aux mélodies de la musique et à la symbolique du mythe.