De l’implication en général dans nos actes de vie à l’implication du soigné dans le cadre d’un soin.
Qu’est-ce être impliqué ?
C’est participer à l’expérience existentielle dans tous les compartiments de sa personne, autant physiquement (présence locale ici et maintenant) que psychiquement et affectivement. Cela signifie être récepteur des informations échangées avec son environnement au sensoriel comme au sensible.
Il ne peut y avoir d’expérience au sens compréhension en soi que si notre disposition est entièrement ouverte à l’information reçue.
Nous pouvons entendre sentir ou voir quelque chose tout en étant extérieur sur le plan du ressenti ou de la compréhension. Vivre l’expérience au sens historique sans pour autant l’assimiler au sens appropriation. (Expérience au sens intégration consciente de l’information)
Pour vivre réellement et intégrer l’expérience il faut bien sûr être acteur du moment mais aussi être spectateur en même temps. Ou, pour le dire autrement, conscientiser ce qui est reçu, écouter et entendre, regarder et voir ainsi que toucher et sentir.
Un soin est la rencontre interagissante de deux personnes dans un cadre particulier qui appartient à la demande du soigné et à la réponse du soignant. La demande est toujours motivée par une interrogation qui ne trouve pas de réponse : soit une pathologie qui a besoin d’être éclairée pour être comprise, soit une problématique dont l’origine est cachée mais dont les conséquences sont perturbantes.
La disposition du thérapeute ou du soignant est en principe acquise car c’est sa motivation professionnelle. Qu’en est-il de celle du soigné?
C’est, en dehors de la compétence de l’homme de l’art, une des clés de l’opérativité thérapeutique.
La motivation du soigné vient de sa souffrance et de son désir d’être soulagé, la motivation du soignant est d’apporter son expérience et son savoir à la compréhension et à la résolution de cette souffrance. Le résultat ne peut se trouver qu’à la rencontre interactive des deux protagonistes, c’est le lieu de l’espace thérapeutique.
Là se trouve l’équation du soigné et la nécessité de son implication.
On ne peut déléguer son être, sa personne sans perdre une part de son identité, même si l’intervention est une intervention de type mécanique (chirurgie ou kinésithérapie). L’implication, la compréhension de ce qui justifie l’acte met les deux acteurs véritablement en interaction.
Ici se situe un des fondements de l’étiothérapie : notre corps, dans son expression vitale, est constitué en imbrication et en interaction constante de trois états de la matière : l’état physique, l’état biologique et l’état psychique.
Ces trois états répondent indissolublement et simultanément de la bonne intégration de l’information dans notre corps. Etre impliqué c’est justement être présent au moment dit, de façon cohérente, dans ces trois états constitutionnels. La problématique qui a justifié la demande, le diagnostic et la réparation deviennent par conséquent une évidence dans tous les compartiments dont nous sommes constitués.
A ce moment et, seulement à ce moment là, l’opérativité du soin se réalise, le soigné intègre l’information dans le corps (cicatrisation) dans la tête (prend conscience) et dans le cœur (conséquences affectivo-émotionnelles)
Trois qualités humaines sont maîtres de nos destinés : la lucidité, la perspicacité et la persévérance.
La lucidité permet la compréhension, la perspicacité va faire émerger la conscience, la persévérance va donner de la cohérence au résultat. Tels sont les fécondités de l’implication.
Patrick LATOUR